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Signifiant matériel, le dossier n’a pas d’autre raison pratique que de désigner un ensemble de documents rassemblés en vue de délimiter une affaire à traiter, un problème à résoudre, un thème à renseigner, mais aussi un individu à surveiller, une personne à soigner, une carrière à « gérer », etc. C’est une évidence, la variété fonctionnelle attachée à un ensemble de « pièces », plus ou moins liées les unes aux autres, détermine une typologie à peu près sans fin : dossier médical, dossier de carrière, dossier de renseignements, dossier client, dossier de notaire, dossier de travail savant dans un tiroir ou sur un bureau d’ordinateur… et bien sûr, par-delà leur usage courant, tous les dossiers d’archives plus ou moins fidèles à leur forme originelle dans la vie sociale. Bref, le monde social s’organise aussi en dossiers. Qu’il soit privé ou professionnel, ouvert ou clos, papier ou numérique, le dossier structure un large pan des activités sociales et semble en parallèle animer l’action politique et administrative. Les dossiers constituent une flore vivante, peuplant, régulant et ponctuant les actions et les identités, non seulement sociales, financières, judiciaires mais aussi savantes et intellectuelles : la fossilisation des dossiers accompagne les actes performatifs du temps social jusqu’à la clôture des affaires, la mort des acteurs ou la disparition des objets qu’ils documentent. La « forme-dossier » est pour ces motifs l’espèce dominante de l’archivage définitif, au point d’être bien souvent l’unité de description de base des inventaires et autres modes d’accès aux fonds d’archives susceptibles de devenir le point de départ de toute enquête…

Place: Paris Publisher: Belin